LES HOMMES DE MON KSAR

LE BON SENS DU NOMADE

Je roulais tranquillement sur la route reliant Errachidia à Goulmima lorsqu’au niveau de M’Igrissen, je vis devant moi un homme qui marchait sur le bord de la route. Un bâton placé à l’horizontale sur ses épaules et la tête couverte par un chèche qui lui cachait la moitié du visage.
Je m’arrête à son niveau et lui demande où il allait.
- A Goulmima me répondit-il
Je lui ouvre la portière avant droite du véhicule et l’invite à monter.
Après avoir parcouru quelques kilomètres je me tourne vers mon passager et lui dis :
- Je connais qui es-tu !
Sans être surpris il me répond
- moi aussi je connais qui es-tu !
- Par les traits de ton visage, tu dois être le fils d’Ouzaid et ton prénom est Ali, lui dis-je
- C’est juste, me dit-il. Mais toi tu es bien Ali Sékou Ouidani ?ajouta-t-il !
- Et comment me reconnais-tu ? Car contrairement à toi dont le visage ressemble à celui de ton père Ouzaid, on me dit que mon visage ressemble à celui de ma mère qu’à celui de mon père ! 
- Ce n’est pas par les traits de ton visage que je t’ai reconnu, me répondit-il
- Par quoi alors, lui ai-je demandé
- Qui peut s’arrêter pour embarquer en plein désert un Arrahal (nomade) tenant un bâton et marchant au bord d’une route pas trop fréquentée si ce n’est le fils ou le petit-fils d’Arrahal ? Une autre personne qui ne connaît rien des nomades aurait de peur accéléré au lieu de s’arrêter.
Nous continuâmes ensemble notre voyage jusqu’à chez-moi et nous partageâmes le déjeuner. 
Moralité : même si nous nous sommes reconnus mutuellement, je reconnais la supériorité d’Ali Ouzaid nomade, berger et illettré qui ne s’est basé que sur son intelligence et le bon sens pour me reconnaître, alors que moi, qui ai fait des études je ne l’ai reconnu que par les traits de son visage qui m’ont rappelé son père feu Ouzaid, un grand ami d’un autre nomade qu’était feu Moha Ouidani mon grand-père !
Comme quoi, n’est pas plus intelligent que d’autres celui qui croyait l’être par son niveau d’études !

 Mai 2008

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