Bonjour monsieur Ouidani. Dans ce texte je passe de la premiÚre personne du singulier à la premiÚre personne du pluriel, c'est la force du sentiment qui détermine dans chaque cas; si je pense que le sentiment est partagé pas des amis, le" nous" s'impose, dans le cas contraire, c'est le "je". Le texte et sa construction logique souffrent de cette incohérence.
Je ne peux ni louer ni condamner; la souffrance et le dĂ©sespoir ont chambardĂ©, en moi, le bien et le mal; et mes idĂ©aux ont lĂąchĂ© prise. Igram n'Igoulmimen est, pour moi, le centre du monde, le centre de l'univers; son existence se confond avec la mienne: Igram, c'est moi; moi et beaucoup d'autres, nous sommes Igram. Voir "la fou", notre ami Ă tous, parler de sa maison qui tombe en ruine m'a dĂ©vastĂ©, ruinĂ©; le gout de cette dĂ©vastation intĂ©rieur est Ăącre, il est, dans la gorge, semblable Ă la fumĂ©e d'un feu intĂ©rieur qui consume mon amour propre. Cet amour que j'ai, aidĂ© par beaucoup d'autres, forgĂ©, tissĂ© en dĂ©ambulant au long des ruelles d'Igram. Pendant les vacances d'Ă©tĂ©, longues, trĂšs longues mĂȘme, flĂąner tristement en trainant notre ennui d'un coin d'Igram Ă l'autre, Ă©levait notre vie, notre existence mĂȘme au rang d'absolu. ProtĂ©gĂ©s par les murs Ă©pais de ce quadrangulaire nous ne ressentions aucune inquiĂ©tude et les quatre tours de guet renforçaient ce sentiment de tranquillitĂ© en radiant la palmeraie des ondes qui apaisaient les Ăąmes . Nous Ă©tions des princes! Les maisons d'Igram qui tombent, c'est une agression contre mon propre moi, c'est de l'autodestruction: J'ai puisĂ© dans les ruelles de cet Igram mon identitĂ©; donc les fanfaronnades, les vantardises qui ont fait de moi ce que je suis; c'est -Ă -dire pas grand-chose cependant vivant. L'Ă©croulement des ruelles d'Igram est l'Ă©croulement de la base de mon existence; je ne suis plus en sĂ©curitĂ© et le nĂ©ant est ma conscience: le vide m'envahit. OĂč puiser la force de continuer le combat? OĂč puiser cette force barbare, cette farouche volontĂ© , cette faim animale qui malgrĂ© nos handicaps, nos dĂ©savantages, nos gĂȘnes, a poussĂ© beaucoup parmi nous Ă se rĂ©aliser, Ă Ă©tudier, Ă ĂȘtre, peut ĂȘtre, des hommes! Nous avons le devoir d'aimer Igram, n'est-il pas un manque d'Ă©lĂ©gance d'abandonner cette forteresse qui nous a inoculĂ© la force de rĂ©sister, de ne pas subir les effets des actions des autres? Elle a rĂ©sistĂ© Ă l'Ă©rosion, cependant, enfants ingrats, nous avons prĂ©cipitĂ© sa dĂ©vastation. Notre destin nĂ©gatif ne doit pas atteindre l'Igram qui est le lieu, l'unique lieu, oĂč notre nĂ©gativitĂ©, notre dĂ©sespoir , notre tristesse se muent en une ivresse: Ne pas s'agenouiller, jamais; ne pas supplier ni implorer ni prier; seulement ,comme Igram, vivre! Vivre n'empĂȘche pas de verser, parfois, quand le chagrin est trop lourd, des larmes, mais il est recommandĂ© de confier ses larmes Ă un coin obscure d'Igram. L'Ă©croulement des maison d'Igram est notre(ma) dĂ©faite! Nous sommes vaincus, incapables, et notre (mon) sort est le mĂ©pris, nous faisons pitiĂ©! Nous sommes assez mĂ»rs pour assister, en festoyant, Ă notre disparition; vaincus et, comme des barbares, nous avons ravagĂ© l'essence de notre existence; nous cĂ©lĂ©brons, comme un mariage, notre mort! L'Ă©parpillement d'Igram, la disparition de son esprit et de son Ăąme fait Ă©cho Ă notre Ă©parpillement: Incapables de faire vivre notre citĂ©, nous sommes rĂ©duits, Ă travers le monde, en esclavage . Sans Igram, l'univers n'a pas de sens, et enfants d'un peuple qui n'a pas su saisir ses chances, nous noyons notre dĂ©sespoir dans la fosse Ă purin. Nos certitudes d'enfant, notre innocence, notre naĂŻvetĂ© se sont effondrĂ©es avec l'effondrement des maisons d'Igram. Vaincus et ratĂ©s, nous avons, enfin l'autorisation, de haire la vie. La vraie vie. La vie sans Igram n'Igoulmimen, pour nous, Ă le gout de la mort. Nous avons travaillĂ© pour gagner nos vies, nous avons gaspillĂ© nos forces au service des autres; ce faisant, nous avons saccagĂ© notre forteresse, l'essence de notre force; et nous avons galvaudĂ© notre esprit. l'exile est notre tombeau !
Réponse d'Ali Ouidani : Il ne faut pas pleurer Ighrem, mais pleurer l'ingratitude de certains de ses fils, qui ont oublié ou qui refusent d'assumer une enfance passée dans ses ruelles.
Oui, ils oublient qu'is ont une dette envers ighrem et envers ses ruelles, sa séguiya, ses jardins, ses champs et tighouniwines !.
Demain, la3lou n'Ait M'hamed, n'Ait Zdi Youssef, N'Ait Hlidou, N'Chkoune, n'Ait Krad Ighsane, leur diront: comme nous vous avons vu courrir pieds nus et habillĂ©s d'une "takidourte" dĂ©cousue de chaque cotĂ©, nous aurions aimĂ© vous voir "nous" arpenter avec vos chaussures de grandes marques et vos vĂȘtements signĂ©s ! Mais comme vous ĂȘtes nos fils, nous pardonnons votre ingratitude !